Le roman Les Galeries hurlantes est une fiction fantastique et par définition l’imaginaire y est omniprésent. L’histoire et la catastrophe qui y sont évoquées restent totalement fictives : entendez par là que même si historiquement le 27 décembre 1974 est marqué d’un véritable drame gravé dans les mémoires, aucun lieu, aucun élément, aucun personnage qui y est évoqué n’a existé. Les faits relatés dans le roman ne s’y sont jamais produits.
Enfant du bassin minier avec des mineurs de fond dans ma famille (mon arrière grand-père paternel, mon grand père paternel, mort de la silicose après avoir travaillé dans une cokerie et respiré la poussière de charbon, mes grands-parents maternels, un oncle…), et fier de l’histoire enracinée dans la terre de ma région, je ne pouvais pas ne pas rendre hommage, moi qui aime explorer l’Histoire si riche de notre pays (aussi tourmentée soit-elle) à ces hommes et ces femmes, et même ces enfants, dont le courage a traversé le temps et les frontières.
L’idée qu’il puisse encore subsister sous mes pas d’anciennes galeries minières dans lesquelles tant d’événements se sont produits, dans lesquelles des hommes travaillaient chaque jour, chaque nuit m’a toujours fascinée. Bien qu’elles soient désormais probablement inondées, écroulées, et les puits rebouchés, j’ai collecté plusieurs témoignages de mineurs m’expliquant qu’au fond y sont restées de nombreuses choses (des machines, des outils, du matériel…). Et moi qui suis passionné d’exploration, l’idée de projeter mon personnage principal, Alan Lambin, au cœur de ces endroits chargés d’Histoire et qui m’inspiraient, et dans lesquels je rêvais moi même de me « promener », est alors apparue. J’en suis même arrivé à l’envier, ce cher Alan, de s’y être enfoncé à ma place. Peut-être que certaines galeries sont demeurées intactes, peut-être que tout s’y trouve encore…
Les catastrophes minières ont été nombreuses et toujours lourdes des vies qu’elles ont enlevées. Celle de Courrières (62) en 1906 avec 1099 victimes est encore et restera dans les mémoires.
Il me fallait bien entendu m’inspirer d’événements qui se sont toutefois produits, car les ravages et les drames provoqués par les coups de grisou restent une réalité historique. Pour ancrer le déroulement de l’histoire des Galeries hurlantes, je me suis inspiré d’une date qui avait particulièrement retenu mon attention, compte tenu qu’elle se situait 2 jours après Noël, le 27 décembre 1974.
Si je ne me suis pas inspiré de la réalité historique ni des lieux de la catastrophe qui ce jour là frappait la fosse 3, dite Saint-Amé de Lens-Liévin (62) en faisant 42 victimes, cette date m’a toutefois beaucoup troublé : 2 jours après Noël… Les cœurs n’étaient soudain plus à la fête. J’avais 1 an en 1974.
Le décor des Galeries hurlantes était alors planté et situé dans le temps, et à travers cette histoire surnaturelle et frissonnante je voulais dédier un vibrant hommage à mes racines, ma famille, mais aussi à tous les hommes, toutes les femmes, tous ces enfants qui ont si durement travaillé et qui ont parfois payé de leur vie, plus particulièrement ce jour de 1974.
Mais puisque je me suis inspirée d’une date à laquelle un drame s’était réellement produit, voici l’occasion de raconter ce qui s’y est vraiment déroulé ce jour-là…
La catastrophe de Liévin en ce noël 1974 était la plus grande tragédie que connaissait le bassin houiller du Nord-Pas-de-Calais depuis celle de courrières qui avait fait 1 099 victimes en mars 1906 (source : l’humanité.fr).
La catastrophe de La Clarence, le 3 septembre 1912.
Dernièrement, monsieur Daniel M. me faisait remarquer dans un mail l’existence d’une autre catastrophe, étrangement plus méconnue, s’étant produite le 3 septembre 1912, soit 6 ans après celle de Courrières. C’était à la fosse 1-1 bis, dépendant de La Compagnie des Mines de La Clarence, qui exploitait la houille grâce à deux fosses situées à Divion (62) et Calonne-Ricouart (62). Ce drame fit 79 victimes et 23 blessés. Un bilan qui apparaît dont plus lourd que celui de Lièvin, le 27 décembre 1974 (https://fr.wikipedia.org/wiki/Compagnie_des_mines_de_La_Clarence).
Photo du jour de la catastrophe de La Clarence (source : Wikipedia)
Photo du jour de la catastrophe de La Clarence (source : Wikipedia)
Le journal l’humanité.fr relate : « Le 27 décembre 1974, à 6 h 30 du matin, un violent souffle dévasta à 710 m de profondeur une part de la fosse 3, dite Saint-Amé de Lens-Liévin. Une cinquantaine d’hommes se trouvaient au fond, exécutant des travaux préparatoires pour l’exploitation future de ce chantier. Quarante-deux gueules noires y laissèrent leur vie, le plus jeune avait vingt-cinq ans, le plus âgé cinquante-quatre : à cet instant, cent quarante enfants devinrent orphelins ! L’émotion fut considérable… L’accident était donc lié à un coup de grisou. Composé de 90 % de méthane, inodore et invisible, le grisou était le gaz redouté des mineurs. »
Un reportage poignant au plus près de ceux qui ont vécu le drame.
Le journal de 20 heures, du 27 décembre 1974.
« Non seulement ils sont morts pour rien, mais ils auraient dû ne pas mourir » Le 27 décembre 1974, 42 hommes sont morts dans la mine de Liévin. L’écrivain Sorj Chalandon raconte la catastrophe oubliée.
Fosse 3, dite Saint-Amé de Lens-Liévin
Quelques photos du quartier de SIX SILLONS après le coup de poussières.
(sources : galibot62.skyrock.com)
Photo Daniel Marir depuis http://fouquiereschf.free.fr
VICTIMES DE LA CATASTROPHE MINIERE
du 27 décembre 1974
Alphonse BARAN
Roland LENFANT
Roger BERNARD
Emilien LHERMITTE
Pierre BERTINCHAMPS
Jean LORENSEN
Kléber BLANCHART
Roger MARTINY
Louis BRASSEUR
Victor MATUSZEWSKI
Jean DELPLANQUE
Georges MICHEL
Emile DELVAUX
Joseph NAGY
Jean-Michel DEVAUX
Henri OBERT
Raymond DHEILLY
Ahmed OUCHLIH
Edouard DUPUY
Paul PILCH
Gilbert FASSEAU
André PITON
Henri FAYEULE
Adrien PRUVOST
Pierre GODART
Daniel RAMEZ
André GRANDIN
Alfred SEREUSE
Raymond GUILBERT
Czeslaw SZYMANSKI
Jean-Marie JOLIE
Jacques THERY
Edmond KACZMAREK
Paul VANDENABEELE
Julien KRZYCH
Edouard WALAWENDER
Jean KUBIAK
Georges WARIN
François LEFRERE
Joseph ZAVODSKI
Jules LEGRAND
Joseph ZIELEWSKI
J’adresse également une pensée particulière aux victimes de l’accident minier de Leforest, ma commune, qui est survenu le 24 mars 1969 et dans lequel Marc Courtecuisse, cousin de ma mère, a perdu la vie. La cage d’ascenseur, qui ne servait normalement qu’au charbon et au matériel, et qu’il avait empruntée avec quatre autres camarades afin de rejoindre d’autres galeries, s’est écrasée dans le puits. Quatre des cinq mineurs sont morts sur le coup, le cinquième à l’hôpital.
Photo, Relais 1969 (source http://fouquiereschf.free.fr)
LEFOREST – 24 mars 1969 |
COURTECUISSE Marc, 26 ans, 1 enfant, électro-mécanicien. DEMARLIERE René, 41 ans 6 enfants, électro-mécanicien. MURREDU Albert, 48 ans 3 enfants, aide-mineur. OKOLSKI Marian, 30 ans, 4 enfants, électro-mécanicien. WLAZLO Stanislas, 44 ans, 2 enfants, électro-mécanicien. |
La fosse N°2 de Flines, abandonnée. Commune Anhiers (59)
Source : http://mineur62.free.fr
Historique : Construite au début du 20 ème siècle, son chevalement est détruit durant la Première Guerre mondiale. Il sera reconstruit en béton armé. La mine peu rentable cesse son exploitation en 1922. Elle sert durant la Deuxième Guerre mondiale de camp de prisonniers, tout en continuant de servir aussi de puits d’aération pour d’autres fosses en activité. Elle ferme définitivement en 1958, et le puits profond de plus de 300 mètres est remblayé l’année suivante.